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  • Christophe COUPEZ

Elodie GUIU (La Poste) : la transformation digitale interne de La Poste

A force de voir sur LinkedIn les posts enthousiastes d’Elodie GUIU consacrés à l’expérience Microsoft 365 à La Poste, j’avais envie d’en savoir plus, à la fois sur l’histoire digitale de la Poste et sur la personne elle-même.


Parlons d’abord d’Elodie. A tout point de vue, elle est l’évangéliste numérique interne (lire) que chaque entreprise devrait avoir pour transformer réellement le quotidien avec une suite collaborative, réinventer les scénarios de travail, trouver de nouvelles idées pour tirer pleinement partie des outils, donner l’impulsion, être l’une des locomotives qui tirent le train du changement. Elle a la passion de ce qu’elle fait et la conviction de ce qu’elle dit parce qu’elle est elle-même utilisatrice.


Mais elle n’est pas la seule : j’avais déjà interviewé un autre acteur du digital interne de La Poste en 2018 (Christophe LAIGLE – lire l’interview). Visiblement une véritable communauté s’est créée dans l’entreprise La Poste, entre ambassadeurs, sponsors, utilisateurs. Les choix audacieux de l’entreprise (dixit Elodie, à juste titre) contribuent à ce succès. Ces choix restent malheureusement rares, ce qui explique le taux élevé d’échec des déploiements. Ou plutôt devrions nous parler de “non succès” car les outils ont techniquement été déployés dans beaucoup d’entreprises, mais sans aucun changement notable ni gains constatés au quotidien.


Bravo à La Poste pour ce bon exemple donné aux autres entreprises qui souhaitent tirer avantage du digital interne et merci à Elodie Guiu pour nous partager cette expérience dans cette interview et via les posts dans LinkedIn.


Elodie pouvez-vous nous présenter votre parcours et votre mission actuelle ?


Elodie : Je suis tout à la fois postière / cheffe de projet / communicante / ambassadrice numérique / community manager / ambassadrice de la parité / ingénieure / innovatrice / auditrice / consultante / accompagnatrice du changement ... et finalement un peu couteau suisse.


Une pure “slasheuse”, comme aiment à s’identifier de plus en plus de personnes … et c’est ce qui me va le mieux. J’ai la chance de pouvoir accompagner le changement depuis 15 ans à La Poste, entreprise qui s’est - je pense – la plus transformée ces vingt dernières années et dont les transformations n’ont pas fini de vous surprendre ! J’accompagne le changement dans une start-up qui a 6 siècles et ce terrain de jeu est tout simplement incroyable.


Il semble y avoir de belles histoires digitales internes à la Poste. Pouvez-vous nous en raconter quelques-unes ?


Elodie : Il y a de très belles histoires digitales et ce sont certaines d’entre elles qui, par mes partages sur Linkedin, nous permettent d’échanger aujourd’hui. J’en suis ravie !


Il y a d’abord cette histoire digitale qui vous a conduit à interviewer mon collègue Christophe Laigle il y a quelques mois (lire l’interview en cliquant ici), celle de la TEAM Communauté Microsoft La Poste qui rassemble aujourd’hui plus de 5000 postiers. Elle constitue une très grosse base de données FAQ : un canal par application, quelques modérateurs pour que cela tourne.


Cette communauté est la preuve de notre transformation interne et la preuve de ce que les services digitaux tels que TEAMS ou YAMMER permettent : avec cette communauté, nous avons mis en œuvre, avec simplicité et proximité, une plateforme du lien et des échanges, humaine et digitale. Et cette plateforme a été créée par l’un d’entre nous ; elle a grandi, mois après mois, pour devenir une très belle preuve de la mise en œuvre d’intelligence collective et de notre capacité collective à nous entraider et abolir les frontières géographiques et organisationnelles. Mes collègues du Digital Social Club rassemblant une vingtaine d’entreprises de la région Auvergne-Rhône-Alpes autour des questions du numérique, nous l’envient terriblement !


Il y a cette seconde belle histoire digitale, celle d‘un pari un peu fou … celui de faire à distance une rencontre managériale en novembre 2019 pour 900 personnes, afin d’éviter aux postières et aux postiers de venir sur Lyon, depuis toute la région Auvergne-Rhône-Alpes. Par cette demande, exprimée par ma cliente interne Sylvie Berodias, directrice de la communication en Auvergne Rhône Alpes pour la Branche Services Courrier Colis, j’ai lancé, pour la 1re fois au sein du groupe La Poste, et avec l’aide indéfectible de François Lorillard, un événement digital à une époque où personne ne savait ce que COVID signifiait.


Ce jour-là, en une seule rencontre, en permettant aux postières et postiers de rester dans leur établissement, nous avons fait l’économie de 40 000 km et d’un an de temps de travail ! C’est comme si nous avions mis un de nos managers dans une voiture jaune et qu’il avait fait le tour de la Terre pendant un an … Bilan RSE et QVT hors norme … Depuis, de mon côté, j’ai réalisé plus de 35 événements à distance et la solution s’est diffusée par capillarité à vitesse grand V. Les réseaux sociaux internes et les tutos vidéos que j’ai pu enregistrer ont été un vecteur d’accélération de ce changement.


Il me reste du temps pour une troisième belle histoire (je pourrais passer 3 heures à en raconter) ? Alors ce sera mon histoire personnelle, celle de mon plus grand plaisir quotidien. Travailler sur mon smartphone le matin en terrasse d’un café et passer / “slasher” de mes équipes à mes communautés, tout en vérifiant un document co-édité et en ajoutant une action à ma “to do list”, et en regardant s’il ne me reste pas un dernier petit mail. Je crois que ce type de suite collaborative est la stricte copie de la manière dont fonctionne mon cerveau … Et ça, ça me simplifie grandement la vie !


Comment est-ce que La Poste a engagé l’adoption en interne de ces nouveaux usages ?


Elodie : Un mélange tout à la fois d’une démarche officielle d’entreprise et d’un réseau d’initiatives personnelles.


Un projet stratégique d’entreprise, porté par 3 sponsors du COMEX : la DRH du groupe, la directrice de la branche Numérique de l’époque, et le Secrétaire Général, visant à créer “.com1” (un point commun) entre les branches du groupe. Les branches avaient (avant .com 1) des messageries différentes ; la décision de tout mutualiser a été salvatrice pour le rapprochement et l’efficacité des équipes.


La direction de ce projet a fait des choix très audacieux, que j’ai rarement vu dans d’autres entreprises, et qui explique – je pense – l'adoption rencontrée aujourd’hui. La direction du projet (sous la houlette de Nathalie Brousset) a pris la décision de déployer partout sur le territoire et pour toutes les équipes, d’un seul coup, la suite collaborative .com1. Et d’ouvrir des droits très larges, permettant par exemple à tout un chacun de créer une équipe ou une communauté. Ce choix était très audacieux et s’est avéré payant. Cela a été aussi payant de faire ce déploiement général en 2018 ; le 17 mars 2020, nous étions prêts.


Car c’est par ce choix très audacieux d’ouvrir sans limite que des initiatives locales, et heureuses, ont pu émerger. J’ai parlé tout à l’heure d’une première communauté autour des services digitaux. Il y a aussi la communauté de communicants que nous avons pu former autour des événements digitaux, grâce à ces outils collaboratifs. Je pourrais aussi parler de ce que mon collègue, Michel Auque, responsable d’une équipe de facteurs et grand innovateur, près de Perpignan, a réussi à mettre en place. Michel a tout de suite vu l’extraordinaire potentiel des formulaires en ligne, par exemple, pour ses contrôles opérationnels de 1er niveau sur nos voitures jaunes et l’a déployé auprès de ses facteurs, tous équipés de smartphone depuis 2015. Ses solutions sont aujourd’hui reprises partout sur le territoire et font des petits dans de nombreuses applications métier. C’est “ceux qui font”, qui savent le mieux ce qui est bon pour eux et la suite collaborative .com1, doublée des décisions de gouvernance que nous avons prises, permet cela.


La gouvernance du projet a aussi su prendre des décisions courageuses, et difficiles – mais indispensables, comme par exemple le décommissionnement des serveurs physiques, qui est déjà largement enclenché chez nous et entraine un déménagement numérique de masse vers l’ensemble de la suite collaborative. L’adoption s’en trouve accélérée et les équipes peuvent s’appuyer sur un robuste réseau d’ambassadrices et ambassadeurs numériques, comme Michel, Christophe ou moi, pour les aider.


Quels conseils pourriez-vous donner aux entreprises pour réussir à tirer partie de ces nouveaux usages ?


Elodie :


- Sortez le sujet de la DSI et faites-le porter par une direction de la transformation interne, suffisamment peu staffée pour qu'elle soit obligée de structurer et de s’appuyer sur des personnes dans les équipes (un réseau d’ambassadrices et d’ambassadeurs). Ce n’est en AUCUN CAS un sujet technique ni un sujet informatique (et d’ailleurs, peu importe la solution choisie : chacune a ses avantages et ses inconvénients), c’est un sujet managérial. Avec ces suites collaboratives, c’est le travail lui-même qui se transforme.


- Appuyez-vous sur ce réseau d’ambassadrices et d’ambassadeurs pour accompagner le changement. Le plus efficace, c’est quand des pairs parlent à des pairs


- Parmi ces ambassadrices et ambassadeurs, choyez ceux qui seront en capacité de travailler main dans la main avec les directions dont le métier et les missions évoluent fortement du fait de la transformation numérique. Vous les avez citées dans votre ouvrage “Le digital interne en entreprise” : la direction de la communication, la direction des ressources humaines et ensuite chacune des directions métier.


- Accompagnez individuellement chacun de vos dirigeants. Ce sont vos VIP. On dit souvent en conduite du changement que “les escaliers se balayent par le haut” ; n’attendez pas qu’ils s’approprient ces outils pour démarrer le déploiement mais offrez à chacun de vos dirigeants un ambassadeur de choc, pour répondre à toutes leurs questions. Faites-en un sujet de développement de compétences, pour de vrai.


- Ayez l’audace de ne pas contrôler a priori et lancez l’ensemble de la suite collaborative, partout, dans toutes les équipes. Tout ouvrir d’un coup ! Vous n’avez aucune idée des champions qui vont émerger ici ou là … Or, si vous choisissez une ou deux équipes pour ouvrir les premières applications, qui vous dit que ces équipes hébergeront des champions ? Offrez-vous la chance d’être surpris par vos collaboratrices et collaborateurs !


- Faites confiance à vos équipes, elles savent, elles ont envie (pour certaines) et croyez à la puissance de la capillarité. Il suffit de 10% des effectifs pour transformer en profondeur une entreprise


- Questionnez-vous sur la notion de “confidentialité” … et questionnez-vous pour de vrai. La croyance populaire est que tout, en entreprise, est confidentiel. Ce que vous comprendrez assez vite, si vous prenez le temps d’y réfléchir, c’est que la majorité des informations peuvent être entendues de tout votre personnel...


- Communiquez vos belles réussites, en interne et en externe. Soyez fiers de chacune de vos petites victoires et célébrez-les car le chemin est terriblement long et demande des ressources de marathonien, surtout dans une entreprise de 249 000 personnes


- Offrez-vous le livre “Digital interne en entreprise” et abonnez-vous à la chaine Youtube de Christophe Coupez … je ne dis pas cela parce que Christophe m’interviewe aujourd’hui mais parce que c’est une bible indispensable pour comprendre ces sujets de transformation et ne pas se tromper de stratégie pour conduire votre changement. Surveillez aussi tous les ans la sortie de l’étude Lecko sur la transformation interne. Et densifiez votre réseau LinkedIn avec des experts bien choisis pour mettre en œuvre une veille efficace


Grâce à vos publications et à ceux de vos collègues, La Poste commence à avoir une belle image de modernité avec sa transformation digitale interne. Est-ce LinkedIn fait partie de la stratégie de transformation ?


Elodie : LinkedIn ne faisait pas partie - à l’origine - de la stratégie de transformation.


Mais par les choix exprimés ci-dessus (et notamment le réseau des ambassadrices et ambassadeurs), c’est finalement devenu une pierre angulaire du changement, impulsant des innovations partout sur le territoire. C’est par LinkedIn que nous sommes informés du déploiement des innovations sur notre suite collaborative. Nous en avons connaissance au préalable, grâce au partenariat que nous avons avec l’éditeur : il nous informe tous les trimestres de sa feuille de route sur l’ensemble des produits, à court, moyen et long terme et nous permet de participer à certains de leur développement.


L’éditeur nous met donc “l’eau à la bouche” sur les transformations qui arrivent ; nous gardons généralement ces informations pour quelques experts parmi les ambassadrices et ambassadeurs (quand je dis “nous gardons” … cette information est partagée dans une équipe publique interne à notre organisation mais nous ne polluons pas les opérationnels avec cela. Seuls quelques initiés en prennent connaissance).


Grâce à LinkedIn, et notamment au réseau que je me suis constitué, incluant un certain Christophe Coupez 😉, je capte les nouveautés et les réinjecte en interne, dans les communautés que nous avons. Une simple publication avec en titre 🆕 ou une “annonce” quand cela le nécessite pour informer les 5000 membres de la communauté ; je ne le fais en général que quand la nouveauté est arrivée dans notre organisation.


Démarre alors une communication par capillarité, avec les commentaires de mes collègues et les tests que nous pouvons faire (nous avons ainsi testé dernièrement une nouvelle option webinaire, pour voir ce qu’il pouvait se passer quand on dépassait la barre des 1000 participants ; il nous a fallu une semaine simplement pour monter l’opération, sur un coin de table … ou plutôt un coin de clavier).


Une fois le sujet bien cerné, la petite équipe responsable de la transformation numérique interne capitalise l’information sur notre site intranet “.com1 change” et déploie, si besoin, une webconférence à ce sujet, dont la tenue est annoncée (encore 😉) par mail ainsi que sur nos réseaux sociaux internes et le replay mis à disposition ensuite.


Et nous bouclons la boucle en valorisant sur LinkedIn certains de nos succès, comme je peux le faire de mon côté. Je constate que nous devenons progressivement une référence sur la transformation interne numérique. C’est en tout cas ce que nous entendons en échangeant avec les experts ou en découvrant l’adoption dans les autres entreprises. Alors soyons en fier et valorisons-le ! Et merci de me permettre de le faire aujourd’hui, de manière plus posée qu’un simple post LinkedIn

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